BIODIVERSITÉ - Le canyoning au printemps est un vrai trésor
Le milieu de canyoning est extrêmement riche et fragile. Ce printemps 2022 m'a encore une fois bouleversé par de la beauté de sa biodiversité. Avec mes groupes, j'ai eu la chance de vivre de nombreux moments privilégiés qui attirent notre attention sur la fragilité du milieu, le soin et le respect dont nous devons faire preuve lorsque nous descendons ces superbes cours d'eau, en prenant soin d'aller doucement, de ne pas piétiner le fond des cours d'eau.
Dans cet article je partage avec vous ces émotions, dans le but que tout un chacun exerce son oeil observateur sur l'environnement qui l'entoure. En prêtant attention, on peut en voir des choses ! Si vous voulez en apprendre plus sur ces animaux, j'ai mis des liens vers des pages documentés.
Au mois de mai, lors d'un stage de canyoning dans le Mont Perdu en Espagne, alors que nous descendons le canyon
de Trasito, qui coulait encore un peu (il s'assèche vite), nous avons failli passer à côté d'un spécimen d'Euprocte des Pyrénées. Il s'agit d'une espèce d'Urodelle (semblable donc aux tritons et aux salamandres). Sa robe est cependant moins coloré, surtout à l'âge adulte, ce qui le rend très discret. Il se caractérise par une bande orange sur le dos et, contrairement aux tritons et aux salamandres, il a même des ongles !
Le dernier jour du mois de mai, lors d'un stage de canyoning qui se déroule dans le Vercors, nous remarquons une fréquentation massive de salamandres ... à gros ventre ! Nous nous trouvons dans le canyon de Neyron, où il reste quelques vasques avec un peu d'eau dans la partie amont. Nos salamandres sont nombreuses, nous en comptons bien une quinzaine sur notre parcours. Petite particularité : elles nous paraissent bien dodue. Hors les salamandres n'affectionnent pas l'eau dans leur vie adulte, sauf lorsque les femelles viennent mettre bas. A ce moment précis elles viennent pondre leurs larves dans l'eau. Je regrette de les avoir dérangé ce jour dans cette étape cruciale de leur cycle, mais qui l'aurait prévu? Nous avons redoublé de précaution pour ne pas les déranger et passer discrètement. Le lendemain, un autre groupe qui descend ce canyon nous signale ne plus avoir vu de salamandre adulte, mais plein de larves de salamandres. Les larves de salamandres ont des branchies qui les fait se confondre avec les larves des tritons, mais leurs petites pattes dorées indiquent bien qu'il s'agit de larves de salamandres. En passant à l'âge adulte, elles perdent leurs branchies à la faveur de poumons. Phénomène très rare : nous avons même vu un individu nager pour sortir de la vasque. Pourtant il est souvent entendu que les salamandres ne nagent pas. Quelques jours plus tard, en descendant le canyon de la Pissarde, de l'autre côté du Vercors, nous avons la chance d'observé quelques larves de salamandres. Attention à cette période cruciale donc.
Le printemps suit son court et les émerveillement continuent. Alors que nous descendons avec mon groupe le canyon des cascades d'eaux chaudes de Thuès Entre Valls, nous sortons plus tard que d'habitude et alors que nous traversons la Têt pour rejoindre les véhicules, une personne de mon groupe s'esclaffe "Ah, il y a un rat dans l'eau!". Rapidement je comprend la rareté du moment. Il n'y a pas vraiment de rat aquatique, à part notre emblématique Desman des Pyrénées, un très mignon rat surnommé le rat-trompette, de part sa trompe qui lui sert à palper son environnement, pour pallier à sa mauvaise vue. Moment exceptionnel, car rares sont les personnes à avoir la chance de pouvoir observer notre charmant petit rat, trapu, bien rond et fort agité. Les spectateurs n'ont pas l'air de bien le déranger, il nage, il plonge, il palpe et farfouine, il se faufile entre les blocs. Par chance j'ai ma caméra autour du cou qui me permet de faire une petite vidéo, sans en perdre une miette. Je signale mon observation à la Réserve Naturelle de Nyer avec qui je partage cette belle vidéo et ce beau moment.
L'émerveillement suit le fil de l'eau. Alors que le mois de juin bat son plein, j'emmène un groupe découvrir le canyoning dans le canyon de Baoussous, situé à Céret. Ces très belles petites gorges se prêtent bien à l'initiation, et à repousser ses limites, dans un beau cadre sauvage et une eau de source pure. Alors que nous avons fait le plein d'adrénaline et de sensations, et que nous sortons du canyon triomphant, le calme en cette journée de canicule nous permet d'admirer une jeune couleuvre à collier qui venant de capturer un tétard pour son repas. Nous l'observons émerveillés, j'invite mon groupe à bien regarder les détails de cet animal inoffensif et si beau, mais les spectateurs la dérange et elle préfère lâcher sa proie, inerte, pour s'enfuir se cacher dans l'eau sous un rocher. Nous sommes ravis de ce moment et à la fois gênés d'avoir empêché cette jeune couleuvre de finir son repas bien gagné. Je suppose qu'elle est jeune car elle devait mesurer 20cm environ.
La canicule continue de faire monter les températures et j'emmène cette fois-ci un groupe descendre le canyon des Anelles, également situé à Céret. Je leurs fait remarquer la chance qu'ils ont d'être seuls dans cet endroit où il est assez rare d'avoir le canyon pour soi. Aussi nous prenons notre temps et profitons pleinement de ce moment. Je partage avec eux quelques observations sur la nature et leurs fait remarquer les exuvies des larves de libellules (qui sont en réalité des exuvies de nymphe, derniere stade larvaire de la larve) qui restent accrochés, sèches, quelques centimètres au dessus de l'eau. Effectivement, la larve, après avoir passer son cycle dans l'eau, sort de l'eau au moment de passer à son forma adulte. La libellule sort à ce moment là de la peau de la larve, par un trou qu'elle perce sur le dos de la larve. Ce jour-ci, alors que nous observions une exuvie, mon regard se porte sur une brindille à côté, avec une libellule toute déformée : l'abdomen n'est pas bien droit, les ailes sont toutes chiffonnées et collées, elles ont l'air molle : incroyable, c'est la libellule qui vient de sortir de son exuvie ! Quelle chance, quel moment unique ! Nous la regardons un instant alors qu'elle sèche, se défroisse et déplie ses ailes, puis nous continuons notre descente pour la laisser vivre ses premiers moment à l'air libre tranquille.
De nombreux moments privilégiés nous attendent encore, et ces moments alimentent la passion de mon métier, de ce milieu et de l'encadrement de mes groupes.
Je pourrais vous partager encore de nombreuses anecdotes sur ce sujet passionnant de l'environnement. Alors je souhaite de les partager avec vous lors d'une descente en canyoning dans les Pyrénées Orientales.
A bientôt !
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